Il va de soi que la valeur vénale d’un commerce dépend de sa localisation et de son type. Intuitivement, on présume d’une différence de prix entre une boutique de produits à forte valeur ajoutée qui serait située en hypercentre d’une agglomération attractive et une grande surface située dans sa périphérie lointaine. Ainsi, on déduit déjà aisément que l’attractivité de la zone dans laquelle le bien est situé, son affluence et l’étendue de sa zone de chalandise sont des critères qui impactent sa valeur.

Si l’influence des critères de localisation sur le prix des biens est admise de tous, en revanche, quels sont les moyens utilisés pour les objectiver à des fins d’estimation précise et argumentée ? Quelles sont les méthodes employées dans les expertises et quels sont les standards ?

Cet article présente un certain nombre d’outils utilisés par les experts fonciers et immobiliers dans l’établissement des valeurs vénales de biens commerciaux, en faisant un focus sur les critères de localisation et de géographie des lieux. Il s’adresse aux professionnels de l’évaluation immobilière, mais permet à tout à chacun d’appréhender quelques éléments de la logique expertale.

Prise en compte des critères d’emplacement par comparaison avec le marché

Le premier élément qui peut être abordé est celui de l’étude de marché qui est décisive pour la suite des calculs de valorisation. En effet, chaque expertise se doit de présenter une étude de marché, en amont de l’application des méthodes de calcul. Celle-ci prend en compte une description de l’attractivité de la commune et du quartier d’accueil du bien, et les prix, en vente et location, des biens et des terrains similaires au bien expertisé. Aussi, le prix des terrains en zone d’accueil de commerces (autorisés au PLU) ou en zones d’activités économiques est souvent lié à la santé économique d’une agglomération, et donc aussi, à la valeur des commerces et activités qui sont construits sur ces emprises.

Les prix de vente ou de location des biens de même typologie et d’emplacement comparables qui sont retenus dans l’étude de marché seront ensuite directement mobilisés, comme données de référence, dans le calcul de valorisation du bien expertisé.

Les bases fiscales : une standardisation des prix sur la base de la localisation cadastrale

Du point de vue des méthodes basées le rendement, qui à partir de loyers perçus ou théoriques, permet d’obtenir la valeur vénale d’un bien, il est souvent judicieux de comparer les loyers réels avec ceux issus des bases fiscales. Ces bases nationales donnent, en fonction de la commune d’accueil du bien et de son secteur cadastral, les loyers des différents locaux, que l’on peut utiliser ensuite, après quelques précautions d’usage, comme valeurs locatives théoriques. L’utilisation de cette base est souvent utile pour valider des données de marché préalablement identifiées ou pour apprécier l’adéquation entre les revenus locatifs réels perçus et des loyers de référence.

Des critères largement employés dans les Chartes d’expertise immobilières

Il arrive souvent que les surfaces constitutives d’un bien doivent être pondérées, afin de prendre en compte leur usage propre, et d’obtenir, in fine, une estimation plus juste de l’ensemble du bien. Pour les locaux commerciaux, la charte de l’expertise en évaluation immobilière (version de mars 2017), propose des grilles de pondérations différenciées selon la catégorie et la localisation du bien. Ce standard, communément employé par les experts, distingue les centres-villes des périphéries et rend compte des qualités d’affluence et de chalandise via des critères de transit et de densité commerciale (galeries marchandes, retails parks…).

Les Normes Européennes d’Evaluation immobilières (standard TEGoVA) prévoient également des critères de notation variant par type de bien immobilier. Ces « notes », qui sont comparables à des pourcentages à appliquer à une valeur vénale calculée, permettent de définir les sommes à décoter. Ainsi, par exemple, pour les commerces, on peut mobiliser les pourcentages des critères de marché et d’emplacement. L’utilisation de ces taux standardisés présente à la fois des avantages et des inconvénients : on peut leur reprocher que, même s’ils sont relativement simples, explicites, et qu’ils permettent de refléter davantage la réalité, le choix de leur application reste le fait du regard de l’évaluateur, qui doit donc agir avec prudence.

Cela nous permet de conclure qu’une « bonne pratique » expertale implique de la part de l’évaluateur de conforter son impression à partir de l’analyse du marché, une revue bibliographique et des entretiens avec le mandant, son voisinage, voire les institutions. La pratique veut aussi, pour garantir la transparence, que chaque calcul et chaque variable utilisée soit rigoureusement argumentée. Ceci est une condition nécessaire à la production de rapports méthodologiquement satisfaisants.